"Bonjour
Je connais ta fonction, Grande Faucheuse, je te respecte, je me soumets à ta loi implacable, mais là, hier, tu as failli aller trop loin. Et malgré une bonne résistance, là, je sens que je vais
bientôt être à bout nerveusement : alors s'il te plaît, lâche-moi un peu les baskets.
S'il était dans l'ordre des choses que tu emportes mon vieil oncle (je passe sur la cruauté de m'enlever mes deux derniers oncles, l'un paternel, l'autre maternel, en moins de six mois),
pourquoi, deux jours après des obsèques, m'obliger à regarder impuissant un grand ami dévisser en montagne, le voir dévaler à toute vitesse, comme un pantin désarticulé, la pente rocheuse, sur
plusieurs dizaines de mètres, et entendre un montagnard du coin qui a vu la scène dire "oh, ben, là, c'est sûr qu'après une chute pareille, il est forcément décédé".
Même si mon ami n'est pas mort hier après-midi, il l'a frôlée, et c'est un second miracle qu'il s'en soit tiré avec seulement une vertèbre cervicale et une autre lombaire touchées. Pas
d'opération, juste trois mois d'immobilisation et de repos : ouf. Faut-il te remercier et considérer que tu as fait preuve de mansuétude ?
Putain, non, alors, tu vas trop loin, tu rôdes autour de moi, tu as failli m'enlever mon fils hier, quand une petite roche lancée à pleine vitesse est passée à dix centimètres de lui, quelques
fractions de secondes avant que J.L.R. ne bascule dans le vide. Tu as surtout amoché mon ami, lui qui avait si bien organisé ce week-end de rando (ci-dessus à gauche, en pleine explication des
dangers de l'Arcalod).
Et moi je n'arrête pas de revoir dans ma tête ce copain roulant comme un fêtu de paille, depuis hier j'ai dû revoir ce cauchemar une centaine de fois.
Trop, c'est trop, là, tu arrêtes, je n'en peux plus. Après les secours par hélicoptère, l'attente à l'hôpital de Chambéry, il a fallu que je prenne le volant, que je ramène les trois ados
sur Paris (arrivée ce matin à 2h) sans permis de conduire, dans la voiture du copain accidenté. C'est bon, là, oh, STOP !"
P.S. aux lecteurs : pas ou peu d'articles sur ce blog dans les prochains jours, vous comprendrez.
P.S.S. : bravo à mon fiston, ci-dessous au premier plan, qui a gravi puis redescendu ce sommet sans souci.
Mais je persiste à dire que c'était trop dangereux pour des randonneurs du dimanche comme nous, dont l'Everest est le bois de vincennes. Est-ce un signe que ce soit le plus chevronné qui ait
chuté ? Pour lui dire qu'il avait pris des risques en nous emmenant là ? Mystère. Ce qui est certain, c'est que ce genre d'escalade, c'est fini pour moi. Et j'espère convaincre mon fils.
2009-06-29T04:57:00+02:00
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